Ce mercredi 10 novembre 2021 avait lieu une activité quelque peu hors du commun pour le REFAD qui organise habituellement des ateliers et tables d’échanges à titre d’activités de perfectionnement pour les acteurs du pédagonumérique. Suivant une proposition originale de notre directrice au CA, Mme Lauriane Laforge, nous avons opté avec enthousiasme pour l’organisation d’un panel de discussion d’étudiants et élèves des secteurs secondaire, collégial et universitaire afin d’entendre leur perspective de l’expérience d’apprentissage en ligne qu’ils ont vécue durant la crise sanitaire.
L’idée était en effet de réunir des « victimes » de l’apprentissage en ligne, des utilisateurs n’ayant pas choisi cette modalité éducative, afin d’obtenir leur témoignage bien sûr, mais également d’envisager la nouvelle normale, maintenant que les apprenants ont goûté aux approches numériques depuis longtemps préconisées par de nombreux spécialises de l’éducation. L’enregistrement vidéo du panel demeure disponible en ligne. Chaque question était d’abord adressée à un.e étudiant.e en particulier, après quoi les autres renchérissaient avant de passer à la question suivante. Ci-dessous, un sommaire des réponses et échanges. Consultez également les articles de Martine Rioux (École branchée) et de Camille Arpin (Éductive) pour plus de détails à propos de cet événement.
- Qu’avez-vous aimé et moins aimé de votre expérience forcée d’apprentissage en ligne durant la pandémie?
Question adressée d’abord à Aminata Kone, étudiante en Technique d’administration des affaires au Campus St-Jean.
À titre de jeune mère au foyer, Aminata souligne les nombreux avantages du numérique en termes de la conciliation famille – études. Elle indique avoir notamment profité du fait que les cours sont enregistrés, lui permettant de maîtriser des sujets plus difficiles en revisionnant les passages importants. À cet effet, elle a mis au point une stratégie simple consistant à noter durant les cours le moment précis où elle n’est pas certaine d’avoir bien compris, afin de pouvoir y revenir ensuite. Elle mentionne également que cette approche lui confère un nouveau focus durant les cours, attitude qu’elle n’avait pas nécessairement auparavant. Par ailleurs, Aminata avait peu de compétences numériques avant la crise. Elle a obtenu un prêt d’ordinateur de la part de son institution et beaucoup amélioré ses compétences numériques durant la dernière année, profitant du service de soutien offert par le Campus Saint-Jean.
Au chapitre des inconvénients, Aminata note le manque d’interactions sociales et la difficulté de concentration parmi les aspects plus difficiles. Alain souligne pour sa part que le manque d’interactions physiques s’est également avéré un défi pour lui. Par contre, il note que par-delà le contexte éducatif, c’est le contexte sociétaire même qui a changé durant la crise, lui conférant une autonomie et une efficacité qu’il n’avait pas auparavant (temps gagné en n’ayant pas à se déplacer par exemple).
- Quelles compétences avez-vous acquises avec l’apprentissage en ligne et sentez-vous que vous étiez-vous bien préparé.e par votre institution pour faire face à ce nouveau mode d’apprentissage?
Question adressée d’abord à Catherine Lacoursière, élève de 12e année à l’École secondaire catholique de Plantagenet.
Catherine qui étudie en dernière année de secondaire parle de sa meilleure gestion du temps, du sens de l’organisation et de la débrouillardise qu’elle a acquis. En gros et comme Alain, c’est une meilleure autonomie qu’elle a développée grâce à cette expérience.
Valentine mentionne un aspect intéressant à propos de l’apprentissage en ligne, à savoir qu’au-delà des plateformes communément envisagées pour l’apprentissage, e.g. Zoom, Teams et Moodle, il ne faut pas négliger l’effet de levier que confèrent les réseaux sociaux à travers lesquels l’apprentissage se poursuit et s’étend lorsqu’on les exploite sciemment.
- Comment pensez-vous que cette expérience d’apprentissage à distance influencera votre carrière?
Question adressée d’abord à Valentine Kropf, étudiante de maîtrise en Technologie éducative à l’Université Laval.
Valentine travaillait comme enseignante avant la pandémie et son inscription à la maîtrise en technologies éducatives devait l’amener à étudier en comodal. Elle réalise plus que jamais le besoin d’acquérir des compétences numériques dès le plus jeune âge et elle se promet d’accompagner ses élèves dès le plus jeune âge dans le développement de leurs compétences. Elle réalise aussi à quel point les enseignants ont besoin de développer de telles compétences.
Brunette intègre déjà le numérique dans ses études de sciences infirmières, intervenant à distance auprès des patients par exemple. Pour Alain qui étudie en éducation, il sait déjà qu’il basera sa pratique sur ce qu’il a apprécié lui-même dans son vécu d’apprentissage en ligne. Zoic s’inscrit dans le même sens, soulignant que l’association étudiante l’emploie déjà en télétravail, alors il envisage une carrière où il pourra poursuivre cette approche hybride de télétravail et présentiel.
- Quels types d’évaluation vous ont été présentés en contexte de distance; en quoi ces évaluations différaient-elles des évaluations habituelles en classe; et que pensez-vous de ces approches?
Question adressée d’abord à Zoic Jolin-Couture, étudiant à la maîtrise en Sciences politiques et conseiller politique au Regroupement étudiant de maîtrise, diplôme et doctorat à l’Université de Sherbrooke.
Zoic a véritablement apprécié l’approche par travaux basée sur la compréhension plutôt que les évaluations faisant appel à la démonstration des savoirs. Les critères d’évaluation supplémentaires, comme la contribution dans les forums de discussion ont toutefois augmenté significativement le temps de travail exigé de la part des étudiants. Dans son programme, Aminata note que les évaluations en ligne s’effectuaient à caméra ouverte dans la plateforme eClass. Diana rapporte de son côté des examens de compréhension, sans surveillance et d’une durée d’une journée ou quelques heures.
Dans son institution, Alain parle d’examens chronométrés et d’un débat entourant certaines demandes de contrôle à caméras ouvertes et autres logiciels de surveillance. Valentine indique pour sa part que les évaluations dans son programme ont pris un tour décidément plus imaginatif, avec une emphase particulière sur les contrôles formatifs et les travaux en groupe. Les examens sommatifs demeurent chronométrés dans le portail de ULaval. Valentine anticipe le retour dans des salles surveillées lorsque le présentiel sera de mise. Catherine fait part de son côté de moins de par cœur, davantage de projets dans son école, avec des examens à livres ouverts.
- Qu’avez-vous appris à propos de la formation à distance et quelles opportunités cette approche offre-t-elle?
Question adressée d’abord à Alain Lavoie, étudiant en Éducation et vice-président académique à la Fédération des étudiantes et étudiants du campus universitaire de Moncton.
Alain considère que l’apprentissage en ligne constitue une bonne alternative au présentiel. Cette approche respecte le rythme individuel, surtout lorsque les modalités synchrone et asynchrone sont utilisées de pair. L’option d’avoir accès aux cours enregistrés constitue un grand avantage afin de réécouter à son rythme et de revoir des notions qui n’ont pas été comprises. Dans l’ensemble, ces modalités permettent de développer nombre de compétences qui seront utiles la vie durant, notamment au chapitre de l’autonomie, de la discipline et de la gestion du temps. Parmi les autres avantages, Alain note l’économie des déplacements–un facteur environnemental significatif, ainsi que ceux de loyer et de coûts alimentaires lorsque l’étudiant peut habiter au domicile parental. Fait intéressant à souligner selon Alain, la possibilité d’ajouter à son curriculum des cours offerts par une autre institution lorsque ceux-ci peuvent être crédités. Dans son cas, il a suivi un cours offert en Alberta, ce qui lui a permis de rencontrer d’autres personnes. Dans l’ensemble, Alain note également l’utilisation créative et variée d’outils visant l’interaction et l’évaluation.
Dans la discussion de groupe qui s’ensuit, Brunette souligne la possibilité d’interagir avec les différents campus de son université, à Sudbury. Aminata remarque qu’elle maîtrise mieux la matière maintenant qu’elle peut revoir les enregistrements et refaire les exercices; ses notes ont augmenté en conséquence. Pour Valentine, c’est l’approche de la classe inversée qu’elle trouve très porteurs. Quant à Zoic, sa préférence va aux cours asynchrones qui sont rythmés par capsules vidéo, lui permettant ainsi de progresser à son rythme. Zoic apprécie aussi beaucoup la flexibilité supplémentaire qui s’en est suivie pour la remise des travaux notés. En conclusion, Alain ajoute que, fait surprenant, des étudiants qui ne participent pas activement d’habitude en contexte de classe s’impliquent davantage lorsque leur interaction est médiatisée par les technologies.
- D’après vous, la stratégie de votre institution d’enseignement était-elle suffisamment cohérente et uniforme d’un cours à l’autre et d’un professeur à l’autre pour vous permettre d’apprendre de manière optimale?
Question adressée d’abord à Diana Mbonga Diana, étudiante de maîtrise en Études des conflits et présidente de l’Association des étudiants de l’Université Saint-Paul.
Diana note qu’en début de pandémie, les cours offerts dans Zoom se sont avérés de qualité inégale, dû au manque d’adaptation de certains professeurs. Avec le temps, Diana remarque que l’approche s’est beaucoup améliorée, au point où elle a même choisi de demeurer en ligne pour certains cours à la rentrée de septembre, cette modalité lui offrant une flexibilité qui lui convient mieux. D’après son observation, les cours en ligne exigent une préparation plus méticuleuse de la part des professeurs, mais le résultat est meilleur pour le potentiel d’apprentissage étudiant.
Valentine remarque que la présentation en ligne varie souvent beaucoup d’un professeur à l’autre, des idiosyncrasies auxquelles l’étudiant doit s’adapter. À son avis, l’utilisation du forum demeure aussi un puissant outil d’interaction lorsqu’il est bien utilisé. Zoic est d’accord à propos du manque d’uniformité entre les cours offerts en ligne, au point où il a opté d’abandonner lorsqu’il a jugé qu’un cours en ligne ne présentait pas les caractéristiques auxquelles il s’attendait pour cette modalité.
- Comment envisagez-vous le retour en classe dans votre école de rêve?
Question adressée d’abord à Brunette Lafleur, étudiante en Sciences infirmières et directrice de l’Association générale des étudiants et étudiantes au Collège Boréal.
Brunette a pu observer que les diverses plateformes (e.g. Brightspace, Cahoot) permettent une meilleure interaction avec les étudiants. À son avis, ce serait une bonne idée que l’on puisse continuer de tenir des cours qui ressemblent davantage à une conversation dans laquelle les étudiants sont véritablement engagés. Par ailleurs, il ne faut pas prendre pour acquis les liens avec les étudiants. Ceux-ci sont difficiles à établir à distance et c’est un aspect qui manque cruellement à l’apprenant si le professeur ne fait pas un effort particulier pour favoriser les échanges entre apprenants, dans un contexte de distance. Enfin, Brunette remarque que dans un contexte de distance, les professeurs avaient davantage tendance à s’enquérir auprès de chacun s’ils arrivaient bien à suivre et à comprendre, une attitude qu’elle voudrait voir intégrée lors du retour en salle de classe.
Pour sa part, Diana a pris le goût au cours en ligne. Si elle a le choix, elle continuera en ligne à 100% tant cette formule lui convient. Pour Alain, l’école de rêve est une école hybride dans laquelle les élèves ont le choix de participer en présence ou non. Valentine a beaucoup aimé le lien établi avec les experts qui gravitent autour de ses cours en temps de pandémie. Elle voudrait pouvoir maintenir ce lien continuer à les inviter dans les cours pour réfléchir ensemble dans des café-thèmes par exemple.